Série | « Kiitos » Kimi : Japon 2005, de piégé à vainqueur
C’est officiel depuis quelques Grands Prix : Kimi Räikkönen quittera la Formule 1 après 20 ans de présence dans la discipline. Champion du monde 2007, il laissera une trace indélébile dans l’histoire du sport. Entre sa personnalité atypique et son coup de volant exceptionnel, il a su imposer son talent pendant de longues années au plus haut niveau. Focus cette semaine sur son incroyable Grand Prix du Japon 2005, avec une remontée légendaire.
La FIA est parvenue à ses fins : Michael Schumacher ne sera pas champion du monde pour la sixième année consécutive. Plombé par une F2005 peu performante et des pneus Bridgestone inexploitables, le Kaiser doit rendre sa couronne. Et en cette saison 2005, c’est Fernando Alonso qui lui succède au palmarès et ce alors qu’il reste deux Grands Prix à disputer. L’Asturien a été et de loin le pilote le plus régulier aux avant-postes, mais il a surtout su gérer l’avance colossale qu’il s’est constituée en début de saison.
Derrière lui, Kimi Räikkönen paye un début de saison plus que compliqué. Le Finlandais est devenu au fil de la saison le plus sérieux rival de l’Espagnol, mais le retard accumulé était trop important. Il s’était donc lancé dans une course-poursuite impossible pour sauver ce qui pouvait l‘être. Le 36-7 du pilote Renault sur les quatre premières courses pèse très lourd dans la balance, le pilote McLaren étant à 23 points à deux courses de la fin…
Mais tout n’est pas perdu pour McLaren. Dans un autre temps, Montoya s’est montré plus performant que Fisichella sur l’autre Renault. Avec 60 points contre 45 pour l’Italien, le Colombien permet à la firme de Woking de prendre la tête du classement constructeurs pour la première fois de la saison. Si Räikkönen et Montoya comptent huit points de moins que les deux pilotes Renault, les intérims réussis de Gené (cinquième à Bahreïn) et de Wurz (troisième à Saint-Marin) ont toute leur importance. McLaren compte donc deux points d’avance, ce qui nous promet une fin de championnat disputée.
Rendez-vous donc à Suzuka pour la pénultième manche de la saison, mais un premier coup de théâtre frappe le cours du championnat. La pluie s’abat lors des qualifications, alors que certains pilotes n’ont pas encore pu se qualifier ! Ralf Schumacher signe la pole à la surprise générale, devant Button, Fisichella et Klien ! L’Italien est le seul pilote Renault ou McLaren épargné : Alonso part 16ème devant Räikkönen et Montoya. Et comme les changements de pneus sont interdits, autant dire que leur tâche s’annonce ardue…
Le départ est qui plus est mouvementé. M.Schumacher et Alonso s’offrent la moitié du peloton ou presque à eux deux, gagnant respectivement sept et huit places ! Les voici septième et huitième, pendant que Räikkönen est douzième, auteur d’un départ plus prudent. McLaren fait cependant grise mine : Montoya s’est accroché avec Villeneuve et a fini sa course dans le mur, sans avoir pu boucler un seul tour… La voiture de sécurité est logiquement déployée pour évacuer la monoplace du Colombien et nettoyer la piste jonchée de débris.
Au restart, Schumacher s’offre le scalp de Klien et passe sixième, tandis qu’Alonso est plus en difficulté pour se débarrasser du jeune Autrichien, décidément très en verve. Il voit revenir un Räikkönen stratosphérique, qui a déposé les Sauber et la Williams de Pizzonia pour prendre la neuvième position. Il aligne les records du tour et revient sur la Renault et la Ferrari à pas de géant.
Dans le 20ème tour cependant, Alonso réalise un dépassement incroyable sur M.Schumacher dans le 130R. L’Asturien se cale dans l’aspiration de l’Allemand et le double par l’extérieur à près de 300 km/h, prenant ainsi la sixième place. Räikkönen tente d’en profiter mais ne peut doubler la Ferrari, derrière laquelle il se retrouvé bloqué pendant plusieurs tours. Mais il fait malgré tout la bonne opération de la course après la première salve d’arrêts aux stands. Il reste certes derrière M.Schumacher, mais il se retrouve sixième devant Alonso, qui était retombé au onzième rang après son arrêt. Cinquième après l’arrêt de R.Schumacher, il se débarrasse du pilote Ferrari dans le 30ème tour, après 10 tours d’attente malgré tout. Il le dépasse au bout de la ligne droite des stands et se retrouve avec une piste claire, parfaite pour tenter de rattraper le temps perdu.
Il est désormais quatrième et remonte sur Button et Webber, qui ont su profiter des événements de course pour se porter à l’avant. A coups de meilleurs tours en course, le Finlandais les rattrape mais il ne se contente plus de viser le podium. Son objectif est désormais de gagner, et il devra ainsi battre Giancarlo Fisichella, leader incontesté depuis le départ. Et s’il y parvenait ?
Il décide donc de s’arrêter après ses rivaux, d’autant plus qu’il devra juste remettre de l’essence en fin de course. Au 41ème tour, il prend la tête des opérations devant Fisichella, qui s’est cependant déjà arrêté. Mais ce dernier aura fort à faire, car « Iceman » est en ébullition en ce dimanche. Déchaîné, il signe le record du tour dans le 44ème tour avant de s’arrêter et de repartir le couteau entre les dents. Il lui reste huit tours pour remonter et gagner…
A sept tours de la fin, il ne compte que cinq secondes de retard sur un Fisichella dont le leadership est plus fragile que jamais. L’Italien est bien plus lent que le Finlandais et doit désormais prier pour tenir jusqu’au bout. Mais la McLaren revient tour après tour, grossit dans les rétroviseurs de la Renault et tente une attaque à deux tours de la fin. Fisichella pare, mais il semble condamné. Il y a un tour de trop pour lui semble-t-il…
Et en effet dans le dernier tour, Räikkönen prend l’aspiration de Fisichella dans la ligne droite des stands. Le pilote Renault a beau tout tenter, il se fait déposer par un Iceman absolument impérial et imprenable. Ce dernier réalise l’autre dépassement du Grand Prix, celui qui lui offre sa septième victoire de la saison. Bien que battu pour le titre mondiale, il a ici fait preuve d’une maestria absolue, d’autant plus qu’il partait 17ème sur la grille ! Seuls trois pilotes ont officiellement réussi à gagner un Grand Prix de F1 en partant de plus loin (Bill Vukovich pouvant être officieusement omis étant donné qu’il n’a jamais couru en F1, mais que les 500 Miles d’Indianapolis comptaient pour le championnat entre 1950 et 1960…).
L’ambiance est ainsi paradoxale dans les stands. Chez McLaren, tout le monde exulte devant la victoire du Finlandais. Sans complexe, fougueux et agressif, il a gagné une course qu’il ne pouvait tout simplement pas remporter sur le papier. L’écurie de Woking perd cependant la tête du classement constructeurs pour deux points au profit de Renault, qui a mis ses deux voitures sur le podium. Mais la firme au Losange est fortement déçue de la prestation finale de Fisichella. Bien que second, le Romain a laissé échapper une victoire qui lui semblait promise. Certains observateurs y voient là son possible remplacement pour 2006…
Bien que McLaren perdra le titre constructeurs en Chine lors du dernier Grand Prix, cette victoire de Kimi Räikkönen reste dans toutes les mémoires plus de 15 ans après. Personne n’aurait mis une pièce sur la victoire du Finlandais tant il partait de loin, mais à nul l’impossible n’est tenu. Cet exploit est l’une des preuves absolues qu’Iceman reste à coup sûr l’un des meilleurs pilotes de son époque aux côtés d’Alonso ou de Schumacher. Un peu de chance mais surtout beaucoup de détermination, de sang-froid et un coup de volant incroyable lui ont ouvert les portes de la postérité. A n’en pas douter, il deviendra un jour champion du monde…
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Pierre Laporte
Né avec le rêve de rejoindre Schumacher, Senna ou encore Prost au firmament de la Formule 1, aujourd'hui j'essaie de raconter leur histoire, ainsi que celle de tous les pilotes et de toutes les écuries qui ont fait, font et feront la légende d'un des plus beaux sports du monde.