Les cigarettiers en F1 : Mild Seven, l’aventure Benetton puis Renault
A la fin des années 60, sous la pression des teams qui ont de plus en plus de mal à boucler leur budget, la CSI décide d’autoriser le sponsoring extra-sportif en 1968. C’est ainsi que pétroliers, marques d’alcool et surtout cigarettiers vont investir en masse dans le sport, voyant une opportunité en or de se faire de la publicité tout en assurant la pérennité du sport. Bien que tout le monde ait abandonné la publicité pour le tabac en 2006 à la suite d’interdictions en masse, Philip Morris et British American Tobacco tentent de revenir par la petite porte cette année au travers de publicités pour des produits moins controversés.
Les cigarettes Mild Seven ont vu le jour au Japon en 1977 et sont passées par la suite sous le contrôle de Japan Tobacco, groupe bien plus récent qu’Imperial Tobacco ou British American Tobacco. En effet, JT n’a vu le jour qu’en 1985, mais a réussir à devenir l’un des groupes les plus importants du secteur. À la suite du rachat de RJR International en 1999, JT se retrouve en possession entre autres de Camel, qui a sponsorisé de nombreuses équipes de F1 (Lotus entre 1987 et 1990, Benetton de 1988 à 1993 (sauf en 1990), mais aussi Williams, AGS, Minardi, Tyrrell ou encore Larrousse). Cependant, JT ne va pas faire revenir la marque au chameau en F1.
En effet, Mild Seven entre par la grande porte dans le sponsoring F1 en devenant le sponsor-titre de l’écurie Benetton pour la saison 1994, pour laquelle pilote alors un prometteur Michael Schumacher. Vainqueur à deux reprises avant cette saison, il ne vise rien de moins que le titre mondial face à Senna et Hill. C’est ainsi que les Benetton abandonnent le jaune de Camel pour le bleu et blanc de Mild Seven. Par ailleurs, le cigarettier soutient également la carrière du japonais Ukyo Katayama. C’est ainsi que l’écurie Tyrrell, pour laquelle il pilote, voit ses voitures orner le bleu Mild Seven sur le capot moteur.
La saison 1994 fut terriblement mouvementée et a marqué à jamais l’histoire du sport. On se souvient des décès de Senna et Ratzenberger, ainsi que des accidents graves à répétition (Alesi, Wedlinger, Lehto…), des soupçons de tricherie (Benetton en particulier pour suspicion d’utilisation d’aides au pilotage illégales), des disqualifications de Schumacher pour relancer artificiellement le championnat… Et en cerise sur le gâteau, le Kaiser accroche Hill à Adélaïde pour s’assurer la couronne mondiale, récompensant toute l’écurie Benetton ainsi que Mild Seven, d’autant plus que Katayama a réussi quelques belles prouesses avec sa Tyrrell.
1995 est l’année de la consécration pour Benetton et Mild Seven, avec onze victoires (neuf pour Schumacher qui devient champion du monde, deux pour Herbert qui permet à Benetton de gagner aussi le titre constructeurs), sans tous les soubresauts de la saison précédente. Une belle récompense, car de son côté Katayama multiplie les erreurs et ne marque pas un point de la saison.
Cependant, le cigarettier va accompagner le déclin de Benetton en F1, et ce à partir de 1996. En effet, entre 1996 et 2001 (dernière année de l’écurie, rachetée par Renault en 2000), seul Berger gagne une course (Allemagne 1997, signant ainsi le premier et le dernier succès de l’écurie). De plus, les voitures régressent dans la hiérarchie année après année, n’accrochant plus que des podiums opportunistes, tandis que Mild Seven sponsorise encore Tyrrell en 1996 avant d’apparaître sur les Minardi en 1997, toujours comme sponsor de Katayama qui ne marque aucun point lors de ces deux saisons. Il met un terme à sa carrière de pilote F1 après la saison 1997.
2002 voit ainsi le retour de Renault en F1, dix-sept ans après avoir quitté la discipline. Le partenariat avec Mild Seven ayant été préservé, les voitures françaises se parent de bleu, de blanc et de jaune. Lors de cette saison, Renault termine quatrième au classement constructeurs, loin derrière Williams, McLaren et surtout Ferrari, qui a écrasé cette saison avec quinze victoires, dont onze pour l’inévitable Schumacher ! Mais l’arrivée d’Alonso ainsi que l’abandon du V10 à 111° vont ramener l’association Mild Seven-Renault vers les sommets.
L’écurie va enchaîner les podiums en 2003 et 2004, avec la victoire d’Alonso en Hongrie en 2003 puis celle de Trulli à Monaco en 2004 en point d’orgue. Les Renault R23 et R24 font figure de sérieux outsiders, mais ne parviennent pas encore à rivaliser avec les Ferrari. Mais la réglementation 2005 couplée aux pneus Michelin va faire des miracles. Alonso gagne ainsi sept courses, et Fisichella une, pour gagner son premier titre de champion du monde et permettre à Renault de gagner le titre constructeurs pour la première fois de son histoire (elle avait été vice-championne du monde en 1983 derrière Ferrari). Pénalisées par un manque de fiabilité récurrent, les McLaren de Räikkonën et Montoya ne pourront que jouer les trouble-fête sans vraiment se mêler à la course au titre.
Bis repetita en 2006, lorsqu’Alonso et Renault gagnent de nouveau les deux titres mondiaux, cette fois face aux Ferrari de Schumacher et de Massa. Tout se joue lors de la dernière course au Brésil, lorsque Schumacher crève en début de course et se retrouve dernier. Malgré une remontée magnifique jusqu’à la quatrième place (avec un superbe dépassement sur Räikkonën en prime), il ne peut empêcher Alonso de terminer second et d’assurer les deux titres pour la firme française. Cette même année 2006 voit Mild Seven, comme tous les autres cigarettiers (hors Marlboro avec Ferrari) contraint et forcé de quitter la F1, alors qu’un contrat courant jusqu’en 2009 avait été signé entre les deux parties. Par ailleurs, les interdictions d’affichage des marques de tabac donnaient lieu à de beaux exercices de style sur les monoplaces françaises, les designers s’en donnant parfois à cœur joie.
Mild Seven est donc de ces cigarettiers dont on se souvient au travers de ses nombreux succès ainsi que de cette couleur bleue caractéristique. Devenue Mévius en 2013, il s’agit de la troisième marque de cigarette la plus fumée au monde, derrière Camel et Marlboro, bien qu’elle soit vendue en grande majorité au Japon, et qu’elle fut vendue dans quelques pays d’Europe (ce qui n’incluait ni la France, ni la Belgique, elles furent vendues au Royaume-Uni ou encore en Allemagne).