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La course de leur vie : Monaco 2008, Iceman perd son sang-froid

Dans l’histoire de la Formule 1, nombreux sont les pilotes à connaître des saisons médiocres à catastrophiques. Abandons à la chaîne, accidents, casses mécaniques, ils ne sont pas toujours responsables de leurs déboires. Cependant, il arrive pour certains de briller sur une course, comme une heureuse anomalie qui vient sauver un ensemble peu reluisant. Retour aujourd’hui sur le superbe Grand Prix de Monaco réalisé par Adrian Sutil en 2008.

En trois ans, Jordan aura changé trois fois de nom depuis son rachat fin 2004 par Alex Schnaider. Propriétaire du groupe Midland spécialisé dans la vente d’acier, il veut créer la première écurie de Formule 1 russe de l’histoire. Après avoir tenté un partenariat avec Dallara puis de racheter Jaguar, il se rabat finalement sur l’option Jordan. Si les voitures courent sous le nom Jordan en 2005, l’équipe est renommée Midland en 2006.

Les résultats sont pour ainsi dire catastrophiques, puisque les monoplaces russes ne marquent pas un seul point de la saison. Elles ne finissent qu’une seule fois dans le top 10 (Monteiro 9ème en Hongrie devant Albers), tant et si bien que l’écurie se retrouve rapidement à vendre. C’est ainsi qu’en Italie, un consortium néerlandais mené par Spyker et Michiel Mol (patron de l’entreprise Lost Boys) reprend l’écurie et la renomme Spyker en 2007.

Hélas, mis à part les quelques tours en tête de Winkelhock au Nürburgring (que vous pouvez lire ici), et la huitième place de Sutil au Japon sous la pluie, les mêmes problèmes ressurgissent. L’écurie manque de moyens financiers pour espérer jouer les premiers rôles, et elle se retrouve ainsi de nouveau en vente. Michiel Mol revend ses parts chez Spyker pour les réinvestir dans la nouvelle écurie, en compagnie de l’homme d’affaires indien Vijay Mallya. L’écurie est ainsi nommée Force India.

Force India VJM01

Le Grand Prix d’Australie 2008 voit ainsi arriver les nouvelles Force India VJM01. De nombreux pilotes ont été testés (dont Ralf Schumacher et Franck Montagny), mais c’est finalement un duo expérimenté qui pilote les monoplaces indiennes. On retrouve ainsi Giancarlo Fisichella pour sa 13ème saison en F1, habitué à faire des coups d’éclat avec des monoplaces peu performantes (comme ici). Il est associé au jeune espoir allemand Adrian Sutil, qui a fait ses preuves l’an dernier avec Spyker et en qui l’écurie renouvelle sa confiance.

Cependant, les qualifications vont rapidement démontrer l’ampleur du chantier qui les attend. Dès l’Australie, aucune des deux voitures ne passe le cut de la Q1, avec les 17ème et 19ème temps pour Fisichella et Sutil. L’Italien est victime d’un gros carambolage au départ, tandis que l’Allemand abandonne après huit tours sur problème mécanique. En Malaisie, Fisichella termine 12ème à un tour alors que Sutil abandonne après cinq boucles, de nouveau sur problème mécanique.

Avant ce Grand Prix de Monaco, la balance de performances est clairement en faveur de Fisichella, qui arrive à se débrouiller en course. Sutil est soit trahi par sa mécanique, soit relégué au fin fond du peloton. Il peut toutefois s’estimer heureux : Super Aguri vient de mettre la clé sous la porte, signant la fin des carrières de Takuma Sato et d’Anthony Davidson. Mais la pluie monégasque va changer bien des choses pour l’écurie indienne.

La pluie joue les trouble-fêtes au GP de Monaco 2008

Les qualifications se sont déroulées comme à l’accoutumée. Sutil part 18ème, devant Vettel et Fisichella qui est bon dernier. Cependant, il pleut sur Monaco avant le départ et les conditions sont piégeuses à souhait, une aubaine pour une petite écurie pour espérer briller. Dès le départ, plusieurs pilotes s’accrochent et doivent repasser par les stands pour réparer, les faisant chuter au classement (Rosberg, Glock et Button). Sutil se retrouve rapidement en bataille pour la 10ème place avec Nelson Piquet Jr, mais ce n’est que le début de son échappée belle.

Dans le 13ème tour, il ne double pas moins de quatre voitures pour se hisser en septième position, puis une crevaison lente pour Heidfeld permet à l’Allemand de Force India de se hisser au sixième rang. Il réalise là une très belle performance compte tenu de ce que sa voiture a démontré en début de saison, soit pas grand-chose. Peu à peu, il devient l’attraction de la course tandis que son coéquipier navigue à une lointaine 15ème position. Jamais une Force India n’avait été à pareille fête, et cette course rappelle à certains les belles heures de l’épopée Minardi.

Dans le 27ème tour, Kimi Räikkönen part à la faute à Sainte-Dévote, et doit passer par les stands pour réparer, offrant de facto la cinquième place à Sutil qui n’en demandait pas tant. Décidément, cette situation lui donne des ailes et il n’en finit plus d’étonner tout le monde tour après tour. Non content d’être en position de marquer des points, il tourne aussi vite que les meilleurs et tient parfaitement son rang, au point de profiter de l’arrêt de Webber dans le 48ème tour pour prendre la quatrième position ! Hélas, comme bien souvent pour ces petites écuries le rêve n’ira pas jusqu’au bout…

Sutil suivi de Raikkonen et de Waber au GP de Monaco 2008

Dans le 60ème tour, Nico Rosberg part violemment à la faute à la sortie du S de la Piscine. S’il est indemne, sa voiture est détruite et nécessite une longue intervention de la safety car. La meute est relâchée dans le 67ème tour, avec Hamilton en tête devant Kubica, Massa, Sutil et Räikkönen. Les plus fous imaginent alors le jeune espoir allemand aller chercher le podium, mais le Finlandais va malgré lui mettre un terme prématuré à cet incroyable numéro dans la 68ème boucle.

Alors qu’il est juste derrière la Force India dans le tunnel, il se rate complètement au freinage de la piscine et percute l’Allemand qui n’a rien vu venir. Sévèrement endommagée, la monoplace indienne est contrainte à l’abandon en fin de tour. Triste fin pour une course sortie d’un autre monde au vu de ses performances habituelles… Iceman quant à lui parvient à rejoindre les stands pour changer son aileron avant et repartir, pour finir à la porte des points.

Devant, les positions n’évoluent guère après cet accrochage, et Lewis Hamilton s’impose pour la première fois à Monaco devant Robert Kubica et Felipe Massa. L’Anglais en profite pour prendre la tête du championnat, tandis que le nom d’Adrian Sutil est sur toutes les lèvres. Sa déception est absolument immense, et l’écurie indienne tente via Mike Gascoyne de porter réclamation contre Ferrari au vu de ce que l’accident a provoqué. Räikkönen expliquera à Sutil avoir perdu le contrôle de sa monoplace à cause de ses freins qui n’étaient pas à température, tandis que l’accident de Rosberg aurait eu d’autres conséquences. En effet, Sutil avait doublé plusieurs voitures sous drapeau jaune en début de course, et aurait écopé de 25 secondes de pénalité s’il avait terminé la course. Sans safety car, il aurait sauvé quelques points, mais en l’état des choses il aurait fini hors du top 8 et par extension des points.

Ce miracle ne se reproduira plus de toute la saison, et la 10ème place de Fisichella en Espagne reste le meilleur résultat de Force India pour sa première année dans la discipline. L’Italien parvient à se qualifier 12ème en Italie, à pointer en septième place au Canada et en cinquième place au Brésil, mais la plupart du temps les deux voitures ne quittent pas les deux dernières lignes de la grille. Malgré une saison difficile à l’exception de Monaco avec de nombreux abandons, les deux pilotes sont conservés pour 2009, avec un nouveau partenariat avec Mercedes à la clé…

Né avec le rêve de rejoindre Schumacher, Senna ou encore Prost au firmament de la Formule 1, aujourd'hui j'essaie de raconter leur histoire, ainsi que celle de tous les pilotes et de toutes les écuries qui ont fait, font et feront la légende d'un des plus beaux sports du monde.

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