Dans les yeux de Pierre : GP d’Australie 2008, maudit moteur Ferrari…
Être journaliste F1 implique presque toujours d’être passionné et de suivre le sport depuis un certain nombre d’années. Pour ma part, je regarde la discipline depuis 2004, aussi loin que je me rappelle, alors que je n’avais que 5 ans. Cette époque, il me reste des flashs, des moments précis gravés en ma mémoire. Bien que ces courses n’aient pas toujours eu une signification particulière ou un retentissement immense, lors de cette série spéciale, nous allons les revivre ensemble.
La trêve hivernale entre deux saisons est toujours la plus longue pour les fans de la discipline. Tout le monde attend avec impatience de voir ce que telle ou telle équipe nous a réservé pour la saison qui arrive, au niveau de la voiture, de la livrée… Bien évidemment, il faut également prendre en compte les changements de règlement, de line-up, et cette saison 2008 marque le retour d’un pilote français sur la grille.
Sébastien Bourdais devient ainsi le premier pilote français que je vais voir courir en tant que pilote titulaire dans la discipline. J’avais cependant souvenir de Franck Montagny chez Super Aguri en 2006, quand il avait remplacé le légendaire Yuji Ide (qui n’avait clairement pas le niveau requis pour courir). S’il avait été le seul coéquipier de Sato à lui opposer une réelle concurrence, il avait dû laisser son baquet en fin de saison à Sakon Yamamoto, faute de budget. Malgré ses quatre titres outre-Atlantique en ChampCar, le Manceau a pour coéquipier le jeune et prometteur Sebastian Vettel, quatrième en Chine l’an dernier et promis à un sublime avenir.
Devant, McLaren a choisi de se débarrasser de Fernando Alonso, reparti chez Renault, et d’embaucher à sa place Heikki Kovalainen qui fait le chemin inverse. Ce jeune Finlandais sera clairement destiné à jouer les porteurs d’eau derrière Hamilton, qui compte bien prendre sa revanche sur la saison 2007. En fond de grille, Spyker disparaît pour laisser place à Force India, avec comme pilotes Adrian Sutil et Giancarlo Fisichella.
Ce Grand Prix d’Australie 2008 est donc attendu comme le messie et va permettre d’établir un premier état des lieux. Et force est de constater que les McLaren sont favorites, Hamilton est en pole devant la BMW d’Heidfeld, Kovalainen et Massa, tandis que Räikkonën n’est que 15ème ! Un problème mécanique l’a laissé sur la touche en Q2. Quant à Bourdais, il part 17ème alors que Vettel, 9ème, a atteint la Q3…
Le stress monte à quelques secondes du départ, les lumières s’allument… et c’est parti pour la saison 2008 ! Un départ qui se révèle rapidement mouvementé, puisque ce ne sont pas moins de cinq voitures qui abandonnent sur divers accrochages en un tour ! Webber, Button, Davidson, Fisichella et Vettel sont déjà hors course… et Massa rentre aux stands changer son aileron, pour repartir 17ème et bon dernier. Ferrari ne pouvait pas plus mal démarrer…
Devant, Hamilton contrôle complètement la course, à mon plus grand désarroi. Ni Massa, ni Räikkonën ne peuvent lutter aujourd’hui, et le Brésilien s’accroche avec Coulthard peu avant la mi-course. L’Ecossais abandonne, et Massa fait de même quelques tours plus tard, mettant un terme à une course cauchemardesque. Décidément, tout le monde a décidé de s’envoyer dans le mur aujourd’hui… Il y a tant d’abandons en tout genre qu’après 33 tours de course, seules onze voitures roulent encore ! McLaren écrase la concurrence avec Hamilton devant Kovalainen, et je choisis de reporter mon soutien sur Bourdais… qui est 6ème ! Il y a pire position pour un rookie toutefois assez expérimenté, et il a parfaitement su se jouer des divers accrochages et problèmes mécaniques… pour le moment.
Dix voitures au 44ème tour, neuf au 48ème… Nous sommes là face à une épreuve de survie, où il suffira de franchir la ligne pour aller marquer des points. Une bataille retient mon attention ainsi que celle des caméramans : Sébastien Bourdais est quatrième, devant Alonso et Kovalainen ! En plus d’échapper à tous les pièges de cette course, il a su la jouer fine au niveau de la stratégie et est en passe d’égaler la performance de Vettel en Chine l’année précédente.
L’arrivée se rapproche, les gros points aussi, Bourdais peut réaliser la plus belle performance d’un pilote français depuis 2001 (Panis 4ème au Brésil), et j’y crois dur comme fer. Ni Alonso, ni Kovalainen ne peuvent menacer le Français, preuve de sa performance ! Derrière, Räikkonën abandonne alors qu’il naviguait en 7ème position. Il ne reste plus que huit voitures en piste, et un quinzième abandon survient à deux tours de la fin…
Je lâche un cri de frustration et de peine: le V8 Ferrari de Bourdais vient de rendre l’âme ! Alors qu’il signait un Grand Prix parfait jusqu’ici, sa mécanique le lâche en toute fin de course et lui fait perdre de précieux points ainsi qu’un sublime résultat… Devant, Hamilton s’impose tranquillement devant Heidfeld et Rosberg, tous trois ayant réalisé une course tranquille. Alonso est donc 4ème devant Kovalainen, Barrichello et Nakajima, le dernier pilote à franchir la ligne. Bourdais et Räikkonën sont malgré tout classés 8ème et 9ème, avant que la disqualification du Brésilien (non-respect du feu rouge dans les stands) n’offre un point supplémentaire aux deux pilotes.
Une fois le Grand Prix terminé, je repars dans ma chambre, déçu de voir le Manceau piégé ainsi alors qu’il tenait clairement un résultat totalement inespéré. Bourdais ne méritait pas un abandon aussi cruel, mais lui comme moi étions loin d’être au bout de nos peines. Cette saison 2008 allait fortement me marquer, et ce encore aujourd’hui.
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Pierre Laporte
Né avec le rêve de rejoindre Schumacher, Senna ou encore Prost au firmament de la Formule 1, aujourd'hui j'essaie de raconter leur histoire, ainsi que celle de tous les pilotes et de toutes les écuries qui ont fait, font et feront la légende d'un des plus beaux sports du monde.