SÉRIE – Que sont-ils devenus ? Pedro Diniz, l’homme au portefeuille toujours bien rempli
La Formule 1 est le rêve de nombreux aspirants pilotes, et à ce jour seuls quelques centaines de privilégiés ont pu le réaliser. Toutefois une carrière ne dure pas toute une vie, et bon nombre de pilotes se sont reconvertis par la suite. Si certains sont restés dans le monde du sport automobile, d’autres ont choisi des voies différentes. Retour cette semaine sur Pedro Diniz, qui est devenu homme d’affaires après avoir gagné le respect de ses pairs.
Le Grand Prix du Brésil 1995 est le premier disputé sans Ayrton Senna au départ depuis 1983. C’est dans une ambiance particulière que se déroule cette course, où les Brésiliens rendent hommage à leur idole disparue. Sur la grille, c’est le jeune Rubens Barrichello qui doit supporter toute la pression d’un peuple désespérant de trouver un pilote capable de reproduire ce que faisait Senna. Cependant, un autre pilote auriverde est au départ de ce Grand Prix : un certain Pedro Diniz.
Ce jeune pilote de 24 ans étonne les observateurs de sa seule présence. En effet, il n’a pas obtenu de résultats vraiment probants dans les catégories inférieures. Il n’a commencé sa carrière en karting qu’à l’âge de 18 ans, un âge où les pilotes les plus talentueux sont en F3, voire en F2. Il ne reste pas longtemps dans l’antichambre de la monoplace, passant dans les championnats brésilien puis britannique de Formule 3 entre 1989 et 1992. Il n’y signe que quelques podiums et reste loin des positions de tête au championnat.
Il passe malgré tout en Formule 3000 en 1993 chez Forti. Il ne marque que trois points en deux saisons, écrasé par son coéquipier Olivier Beretta en 1993 ainsi que par son compatriote Gil de Ferran. Mais c’est pourtant lui qui monte avec Forti en F1 pour la saison 1995. La petite officine italienne n’avait pas d’autre choix, car si le coup de volant de Diniz n’est pas exceptionnel, il est le fils de Abilio Diniz, l’un des businessmen les plus riches du Brésil. A cette époque, il dirige la chaîne de supermarchés Pão de Açúcar entre autres et peut aisément financer la carrière de son fils.
La première saison de Diniz en F1 est cependant compliquée. Sa Forti n’est rien d’autre qu’une Formule 3000 un peu plus évoluée et il passe toute sa saison en fond de grille, à se battre contre des Pacific guère plus fringantes. Il termine malgré tout à la porte des points en Australie grâce à un déluge d’abandons avec cependant quatre tours de retard sur Damon Hill, vainqueur d’une course par élimination. A la surprise générale, il est embauché comme second pilote chez Ligier en 1996. L’écurie italienne, privée de son argent disparaîtra au bout de six Grands Prix
Il traîne une réputation de pilote payant comme un boulet, et beaucoup accusent Walkinshaw de l’avoir choisi pour renflouer les caisses de l’écurie… Diniz n’a pas pu profiter de sa première saison pour infléchir sa réputation, mais cet exercice 1996 va lui donner du crédit. S’il ne connaît pas la même réussite qu’Olivier Panis qui gagne à Monaco, il termine sixième sous le déluge en Espagne et en Italie. Mieux, il tient la comparaison face à son coéquipier, pourtant assez réputé sur la grille. Un bon signe pour lui, qui rejoint Arrows en 1997 aux côtés de Damon Hill.
Alors que les observateurs pensent qu’il va se faire réduire en cendres par le champion du monde en titre, il n’en est finalement rien. Diniz fait jeu égal et bat même l’Anglais en qualifications à Spa (huitième, meilleure qualification de sa carrière) et à Suzuka, qui ne sont pas les circuits les plus simples à appréhender… Faute de posséder une voiture fiable et régulièrement performante, il termine malgré tout cinquième sur le Nürburgring, pour le Grand Prix du Luxembourg.
Il est reconduit en 1998 chez Arrows et voit arriver Mika Salo en provenance de Tyrrell. L’Arrows A18 est encore moins fiable et performance que sa devancière, si bien que chaque pilote ne termine que cinq courses sur 16 ! Diniz rentre toutefois à deux reprises dans les points, terminant cinquième en Belgique et sixième à Monaco. Il termine à égalité de points avec Salo, mais derrière le Finlandais qui a terminé quatrième sur le Rocher. Il se fait toutefois remarquer en Autriche en percutant Salo dans le premier tour, alors que ce dernier partait sixième sur la grille…
Un différend l’oppose cependant à l’écurie de Tom Walkinshaw lorsqu’il décide de partir pour Sauber en 1999. L’écurie anglaise veut activer son option pour conserver Diniz, or le Brésilien rappelle une clause du contrat indiquant qu’il est libre de partir si le niveau de la voiture ne lui convient pas… Il rejoint donc Sauber aux côtés de Jean Alesi, présent depuis la saison précédente et signe de très belles performances, au point même de devancer l’Avignonnais au championnat. Il termine trois fois sixième, notamment en Autriche où il marque un point en étant parti seizième ! Mais il connaît aussi un gros accident lors du Grand Prix d’Europe avec un tonneau et un arceau brisé, avec heureusement plus de peur que de mal. Il ne termine ainsi que quatre Grands Prix, mais à l’exception du Japon c’est dans les points.
2000 reste la dernière saison de Diniz en F1. Il retrouve de nouveau Salo mais les relations entre les deux hommes sont plus que tendues. Pour la première fois depuis 1995, il ne termine pas une seule fois dans les points de la saison, terminant au mieux septième en Europe. S’il termine bien plus de courses, il est dominé par Salo qui ne se prive pas de vertement le critiquer. Il déclare ainsi après l’accrochage Diniz-Alesi en Autriche à propos du Brésilien que « vu qu’il ne pouvait pas le sortir, il est allé voir qui d’autre il pouvait dégager ! » Ambiance… Son dernier fait d’armes reste le Grand Prix des Etats-Unis à Indianapolis, où un arrêt aux stands en fin de course le prive du top 6 après avoir été troisième en début de course.
Fin 2000, Diniz entame des pourparlers avec Sauber et Prost pour la saison 2001, mais il se voit contraint d’arrêter sa carrière, faute de volant disponible. Il arrête donc sa carrière de pilote et entre dans le capital de Prost à hauteur de 40 %. Cependant, il ne parviendra pas à en prendre le contrôle et l’écurie disparaît avant le début de la saison 2002. Le Brésilien fonde alors le championnat brésilien de Formule Renault 2.0 fin 2001 avant de totalement quitter le monde du sport automobile.
Revenu dans les affaires familiales, il devient actionnaire de l’entreprise de son père. Il se consacre également à l’agriculture et aux produits biologiques, et fort de sa position, il possède plus de 2300 hectares. Aujourd’hui marié et père de deux enfants, il est désormais un homme d’affaires reconnu, bien aidé par la fortune de sa famille. Son père fait partie selon Forbes des 500 plus grandes fortunes mondiales, ce dernier étant entre autres nommé au conseil d’administration de Carrefour. Respecté dans le monde des affaires et partie intégrante d’un empire commercial, il a su dans une autre vie gagner le respect de ses pairs en Formule 1. De fils à papa fortuné à pilote respectable, il a su se frayer un chemin dans un monde impitoyable pour gagner ses galons. Nul doute que ceci lui est profitable dans sa vie actuelle, à se développer sur un marché qui tend à se répandre.
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Pierre Laporte
Né avec le rêve de rejoindre Schumacher, Senna ou encore Prost au firmament de la Formule 1, aujourd'hui j'essaie de raconter leur histoire, ainsi que celle de tous les pilotes et de toutes les écuries qui ont fait, font et feront la légende d'un des plus beaux sports du monde.