Les pilotes français chez Renault : René Arnoux, France 1979 et 1982
On le sait désormais : Esteban Ocon pilotera pour Renault pour 2020. Il remplace donc Nico Hülkenberg et devient le cinquième pilote français à piloter à temps plein pour Renault, Romain Grosjean n’ayant assuré qu’une sorte d’intérim en 2009. Retour donc ce mois-ci sur les quatre mousquetaires qui ont piloté les monoplaces de la Régie entre 1977 et 1985.
En ce début 1979, la régie Renault se décide enfin à aligner une seconde voiture en Grand Prix. L’écurie française doit absolument obtenir des résultats après plus d’un an de vaches maigres, la faute à une fiabilité plus qu’aléatoire. La Renault RS10 à effet de sol est mise en chantier, mais en attendant la RS01 va assurer l’intérim. Si Jean-Pierre Jabouille est logiquement conservé, c’est un Isérois ayant déjà la trentaine qui récupère le baquet, un certain René Arnoux.
Il n’a, à ce moment, que six Grands Prix d’expérience en Formule 1, disputés en fond de grille avec Martini puis Surtees. Deux écuries financièrement au bord du gouffre et donc totalement incapables de jouer les premiers rôles. Jabouille va donc agir quelque peu comme un mentor, connaissant la voiture et l’équipe par cœur tandis qu’Arnoux va faire valoir sa fougue et sa pointe de vitesse.
Mais son début de saison 1979 s’avère pour le moins difficile. Après sept courses, il n’a pas réussi à faire mieux que dixième en qualifications, et son seul résultat est une 9ème place en Espagne. Il dispose cependant de la nouvelle Renault RS10 depuis Monaco et le Grand Prix de France de cette année, disputé à Dijon, va rester dans toutes les mémoires.
Trois tours, un duel et une foule en délire qui n’oubliera jamais ce final incroyable. Pendant que Jabouille file vers la victoire malgré de terribles crampes, Arnoux revient tambour battant sur Villeneuve, mais la Renault n’a plus beaucoup d’essence. C’est ainsi que se lancent les 10 kilomètres d’un duel homérique pour la seconde place, avec des manœuvres complètement dingues et deux pilotes à la limite, qui se battent comme des damnés. C’est finalement Villeneuve qui arrache la seconde place devant Arnoux, mais ce dernier vient de faire exploser tout son talent et sa ténacité au public de la F1.
Plus heureux que son coéquipier Jabouille, il parvient à signer deux deuxièmes places et se montre lui aussi particulièrement rapide en qualifications, avec deux poles positions. Il achève cette saison avec 17 points, huit de plus que Jabouille mais sans victoire. Qu’à cela ne tienne, le duo est conservé pour 1980 et Arnoux compte bien se battre pour le titre si sa monture, la nouvelle Renault RE20, le lui permet.
Il réalise alors un magnifique début de saison, puisqu’il gagne au Brésil et en Afrique du Sud et mène le championnat après trois courses devant Jones, alors que Jabouille ne score toujours pas. Hélas, bien qu’il ne compte que quatre abandons sur toute la saison, il n’arrive pas à se placer régulièrement aux avant-postes et ne termine qu’une autre fois sur le podium (2ème aux Pays-Bas). Il signe pourtant trois pole positions consécutives, mais il a du mal à confirmer en course. Il se classe 6ème au championnat du monde avec 29 points, très loin d’Alan Jones, et voit Jabouille remplacé par un autre Français en pleine éclosion pour 1981 : Alain Prost.
Alors qu’il pensait pouvoir devenir le numéro 1 de la Régie, il se fait tout bonnement écraser par Prost en course, et ne se sauve qu’en qualifications. Il signe en effet quatre pole positions contre deux pour le nouveau prodige de la F1 française, mais le dimanche est une toute autre histoire. Arnoux ne signe qu’un podium (2ème en Autriche) et ne marque que 11 points, alors que Prost ne termine que six courses qui se résument en trois victoires, deux secondes et une troisième place. Bien que les relations entre les deux hommes se dégradent course après course, le duo est maintenu pour la saison 1982.
Alors que Prost gagne les deux premières courses de la saison, Arnoux finit troisième à Kyalami et ne retrouve pas les points avant le Grand Prix de France. Cette course est cependant le climax de la haine que se vouent Prost et Arnoux. En effet, les deux Renault sont en tête, Arnoux devant Prost, et le premier cité reçoit l’ordre de laisser passer le second, mieux placé au championnat pilotes. Jean Sage lui brandit le panneau « Prost 1, Arnoux 2 », mais ce dernier, passablement agacé d’être considéré comme un numéro 2, choisit de l’ignorer. Il gagne donc la course devant Prost, Pironi et Tambay, mais l’ambiance est plus que tendue sur le podium tant son coéquipier est furieux.
De plus, « Néné » comme on le surnomme, a déjà signé un contrat chez Ferrari pour 1983. Il ne jouera donc plus les porteurs d’eau et rejoint Patrick Tambay, qui a remplacé Villeneuve après le décès du Québécois. Il termine second en Allemagne et gagne en Italie, soignant ainsi son départ de chez les Jaunes pour rejoindre les Rouges en Italie.
S’il rate de peu le titre lors de la saison 1983 face à Piquet et… Prost, il perd son volant chez Ferrari début 1985 pour des raisons assez obscures, officiellement pour des soucis de santé qui réduiraient ses performances. Il rejoint Ligier en 1986, et, après une saison plutôt convaincante, il achèvera sa carrière en 1989 après trois saisons de galère au fond du peloton, comme à ses débuts.
Arnoux avait su, contrairement à Prost, s’attirer la sympathie du public. Certains y voient une ressemblance avec Raymond Poulidor et Jacques Anquetil, le public préférant « Poupou », perdant certes mais plus charismatique que son rival qui n’a qu’un seul objectif : la victoire. Pilote rapide et talentueux malgré tout, une couronne mondiale eut été plus que méritée au regard de sa carrière F1, qu’il a cependant à la manière de Michele Alboreto terminée à se battre pour se qualifier dans des voitures indignes de son talent.
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Pierre Laporte
Né avec le rêve de rejoindre Schumacher, Senna ou encore Prost au firmament de la Formule 1, aujourd'hui j'essaie de raconter leur histoire, ainsi que celle de tous les pilotes et de toutes les écuries qui ont fait, font et feront la légende d'un des plus beaux sports du monde.