L’opinion de Villeneuve: les rivalités australiennes depuis Vettel à Verstappen
À la sortie d’un virage Spadois, nous avions rendez-vous avec le franc-parler d’un certain québécois, Jacques Villeneuve. Le pit stop fut long, et pour faire durer le plaisir, cet entretien sera publié en dix parties, tous les jours à 11 heures.
Daniel Ricciardo. Cet enfant de Red Bull s’est retrouvé à plusieurs reprises à affronter ses propres coéquipiers: d’abord Sebastian Vettel et actuellement, Max Verstappen. Des rivalités qui poussent toujours le challenge encore plus loin et permettent de mettre à l’épreuve le talent de ces rivaux. Jacques Villeneuve apporte sa vision sur ces rivalités.
- On se souvient tous de la saison 2014, où Daniel Ricciardo avait réussi à surpasser le champion du monde Sebastian Vettel à l’étonnement général. Selon toi, Ricciardo étaient réellement plus fort?
Je pense que ce qui a été à la base ce résultat, c’est que chacun avait une approche différente. Vettel ne voulait pas se contenter de terminer troisième, il cherchait des solutions avec la voiture. Il en cherchait trop même, et ça le mettait dans le pétrin. Il voulait beaucoup trop la victoire au lieu de se satisfaire, et il partait dans des extrêmes dans les réglages ou le pilotage. Alors que Ricciardo, lui, il faisait sa route tranquillement. Ce qui était important pour lui, c’était d’être stable. Il n’avait pas besoin de prendre le risque de ne pas l’être pour suivre le rythme de Vettel, il avait déjà gagné. Il n’avait pas ce stress-là, et c’est ça qui lui a permis de dépasser son co-équipier.
- Donc, le fait Ricciardo était plus fort que Vettel, c’était une illusion ?
Sur papier, au niveau des résultats, il l’était, mais pas en réalité. C’est juste que Vettel essayait d’aller chercher quelque chose qui était impossible avec la voiture qu’il avait, donc il en faisait trop.
- Si aujourd’hui, on mettait Ricciardo et Vettel dans la même voiture, Vettel gagnerait forcément selon toi ?
Non, mais non ! Ça n’a rien à voir. C’était la pire saison de Vettel. Il ne pilotait pas comme il pilotait les autres années, il n’était juste pas bien, pas à son sommet. Il y a des années comme ça. On a bien eu des Kimi Raikkonen pas rapides et là, on a eu aussi un Kimi qui vole. Vettel n’avait plus d’énergie quand il était chez Red Bull, il était essoufflé, c’est tout. Alors que Ricciardo, c’était le nouvel arrivant, plein d’énergie. Comme lorsque Verstappen est arrivé chez Red Bull : tout était génial, maintenant ça, c’est terminé.
- C’était génial aussi parce que beaucoup de choses sont bien tombées en même temps : comme l’arrivée d’un nouveau moteur en Espagne.
Voilà, c’est bien tombé et il a réussi à profiter de la situation. On a imposé à Ricciardo un arrêt aux stands qui n’était pas nécessaire et on a donné la victoire à Max. Mais quelle belle histoire !! Mais après ça, qu’est-ce qu’il y a eu derrière ? Pas grand-chose. Le problème c’est que Max a cette image : on en parle comme si c’était un Vettel, un Senna ou que sais-je, mais sur papier il n’en est pas encore là. Alors oui, parfois, il connait des pannes mécaniques mais même sans les compter, il reste encore des petites bêtises. Et qui ramène les points à Red Bull ? C’est Ricciardo. Donc pour l’instant, l’image qu’on s’en ait fait, que Red Bull a donné et que les journalistes aussi ont entretenu, il faut qu’elle devienne réelle, elle ne s’est pas encore concrétisée. Et je pense que ça se ressent dans sa frustration, il commence à se plaindre un peu disant que ce n’est pas sûr qu’il veuille rester chez Red Bull. Et il n’a pas encore gagné quatre championnats pour pouvoir parler comme ça, il faut faire attention. C’est clairement quelqu’un de talentueux mais il a encore un petit step à faire.
Angelique Belokopytov